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République rauracienne, département du Mont-Terrible puis du Haut-Rhin

L’activité révolutionnaire dans la principauté épiscopale de Bâle débute au printemps 1790. L’agitation provient de l’exemple français voisin et des mauvaises récoltes de 1789. Restant toutefois marginaux, les premiers révolutionnaires réussissent à mobiliser l’opinion autour des droits de chasse qui favorisent la prolifération du gros gibier, véritable fléau pour les cultures. Ainsi, un comité de la commune est institué à Porrentruy. Celui-ci réclame la convocation des Etats du pays et reçoit le soutien de la Franche Montagne des Bois et de la prévôté de Saint-Ursanne. Le prince refuse cette demande, ce qui exacerbe l’opposition. Effrayé par les événements révolutionnaires français et l’agitation grandissante de ses sujets, le prince-évêque demande l’aide de troupes autrichiennes à son suzerain, l’empereur. Après quelques tergiversations, les Suisses accordent le passage sur leur territoire aux troupes impériales qui rétablissent l’ordre par la force dans la principauté en mars 1791.
Les révolutionnaires émigrent ou sont emprisonnés et jugés. Leur chef de file, Joseph-Antoine Rengguer, syndic des Etats sous le régime épiscopal, se réfugie à Paris où il cherche à faire entendre sa voix. Il organise aussi en vain des coups de force en Ajoie et aux Franches-Montagnes. Ces échecs répétés irritent la majorité de la population qui se détourne des agitateurs.

La déclaration de guerre de la république à l’empereur (20 avril 1792) retourne la situation au profit des révolutionnaires. Le traité d’alliance de 1780 autorise la France à chasser les troupes autrichiennes qui stationnent dans la principauté. Effrayé, le prince-évêque institue une régence à Porrentruy et à Delémont avant de fuir devant l’avancée des troupes françaises qui occupent le nord de l’évêché à la fin avril 1792. Ayant pour ordre de respecter les régences du prince, elles libèrent les révolutionnaires emprisonnés et montrent une certaine sympathie pour leurs activités. Malgré leurs efforts, Rengguer et ses partisans ne parviennent pas à renverser la régence de la Cour par les armes et rassemblent leurs partisans d’Ajoie, d’Epiquerez et du Noirmont, respectivement à Boncourt, à Epiquerez et à Belfond, afin de signer une déclaration de liberté.
Peu à peu, inquiétée par l’activité de Rengguer et par l’éloignement du prince, l’élite du pays s’engage dans des sociétés populaires qui, en se chargeant des responsabilités administratives, éclipsent sans violence la régence.
Avec le soutien français, les députés des communes des bailliages occupés s’assemblent à Porrentruy à la fin de 1792. Cette assemblée nationale institue la République rauracienne (carte 7.1) qui ne parvient cependant pas à s’imposer. L’irréductible opposition entre les révolutionnaires et les élites communales crée un blocage institutionnel insurmontable.
La France, constatant cet échec, décide de faire pression sur une nouvelle assemblée triée sur le volet afin de faire accepter l’annexion de la jeune République rauracienne. Le pays devient département du Mont-Terrible le 7 avril 1793 (carte 7.2).
Loin d’être acceptés par tous, ces changements rencontrent des résistances auprès de la
population et des autorités locales. Une révolte armée, exagérément surnommée Vendée rauracienne, éclate même dans la vallée de Delémont et est rapidement dispersée.

Au fil des années, la situation se stabilise et le département s’agrandit. En février 1797, l’ancienne principauté de Montbéliard, dans l’espoir d’obtenir le statut de chef-lieu, choisit d’intégrer le Mont-Terrible lors de sa propre réunion à la France. Ensuite, les bailliages du sud, soumis à une régence d’Erguël ou organisés en conseil provisoire de la prévôté mais promis de longue date au département, sont annexés le 15 décembre 1797 après une invasion méthodique qui prépare l’imminente attaque des cantons suisses. Finalement, Bienne se livre à la France quelques semaines plus tard, lorsque son alliance avec les Confédérés ne lui est plus d’aucun secours.
Le Mont-Terrible, qui est le plus petit département de France, se maintient encore deux ans avant d’être rattaché au département du Haut-Rhin (carte 7.3) à la suite de la réorganisation administrative qui suit le coup d’Etat napoléonien du 18 brumaire. Porrentruy passe ainsi du statut de chef-lieu de département à celui de sous-préfecture, soit chef-lieu d’arrondissement, le centre de décision se déplace à Colmar.

Auteur·trice du texte original: Lionel Jeannerat, 30/07/2015

Dernière modification: 28/08/2015

Bibliographie

André Bandelier, Porrentruy, sous-préfecture du Haut-Rhin : un arrondissement communal sous le Consulat et l’Empire, 1800-1814, Neuchâtel : La Baconnière, 1980
Cercle d’études historiques, Nouvelle histoire du Jura, Porrentruy : Société jurassienne d’émulation, 1984
Gustave Gautherot, La Révolution française dans l’ancien évêché de Bâle, Paris : Champion, 1908, tomes 1-2
Jean-Claude Rebetez, Histoire du diocèse de Bâle à l’époque moderne, Strasbourg : Editions du Signe, 2003
Jean-René Suratteau, Le département du Mont-Terrible sous le régime du directoire (1795-1800), Paris : Les Belles lettres, 1965

Suggestion de citation

Lionel Jeannerat, «République rauracienne, département du Mont-Terrible puis du Haut-Rhin», Dictionnaire du Jura (DIJU), https://diju.ch/f/notices/detail/1003506-republique-rauracienne-departement-du-mont-terrible-puis-du-haut-rhin, consulté le 03/06/2025.

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